La non reconnaissance de la qualité
Écrire un éditorial pour la lettre de Labelix représente toujours un moment de fierté et de reconnaissance envers les médecins radiologues qui volontairement s’engagent dans une démarche d’amélioration de la qualité de leur structure.
Cet effort, important, que font les radiologues est destiné avant tout à proposer à leurs patients l’amélioration constante de leur prise en charge lors des examens de radiologie qu’ils viennent réaliser dans les centres d’imagerie français.
Malheureusement, cet investissement qui est fait par ces médecins ne trouve aucune reconnaissance de la part des tutelles qui nous imposent des contraintes organisationnelles et financières de plus en plus importantes.
La baisse imposée par l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM) sur la valeur des forfaits technique et la suppression du modificateur Z en est le parfait exemple.
Cette baisse qui attaque directement les capacités d’investissement des radiologues risque de ralentir l’entrée des centres d’imagerie, qui ne font pas encore parti de Labelix, dans cette démarche de recherche d’amélioration de la qualité.
Encore une fois, l’aveuglement et l’entêtement des pouvoirs publics vont à l’encontre du progrès et de l’innovation.
Encore une fois, la politique comptable imposée arbitrairement par les caisses d’assurance maladie va à l’encontre d’une amélioration de la qualité de la prise en charge des patients.
Dr Jean-Philippe MASSON
Président de la FNMR
Evènements indésirables en imagerie médicale utilisant les radiations ionisantes : comment les éviter ?
Les événements indésirables en imagerie médicale impliquant des rayonnements ionisants sont un enjeu majeur et peuvent avoir des conséquences graves. En effet l’imagerie est de plus en plus incontournable dans la prise en charge des patients et l’exposition des patients augmente, notamment du fait d’un recours de plus en plus fréquent au scanner et du développement de la radiologie interventionnelle, avec en parallèle toujours des difficultés d’accès à l’IRM.
Dr Jean-Charles LECLERC
Président de la commission de labellisation
Quels évènements indésirables ?
Les évènements indésirables sont de plusieurs types : irradiation accidentelle d’une femme enceinte (c’est un évènement significatif de radioprotection), erreur de patient, pratique inadaptée : surexposition, erreur dans la réalisation d’un examen ou dysfonctionnement d’un appareil… Il ne faut non plus oublier les travailleurs qui peuvent aussi être concernés par des expositions ou situations non ou mal maitrisées. Le cas des manipulatrices enceintes doit être anticipé de même que la présence d’intervenants extérieurs.
Le matériel peut être en cause : pédale de scopie bloquée, déclenchement non contrôlé, vétusté (risque d’évènements indésirables plus fréquent et dose délivrée). L’utilisation de protocole est indispensable mais faut-il encore les connaitre et les appliquer… des difficultés peuvent se poser à l’arrivée de nouveaux personnels, de stagiaires, ou lors d’astreinte avec des manipulateurs utilisant occasionnellement des équipements. Au bloc opératoire ou lors de la pratique de la radiologie interventionnelle, l’âge du matériel, l’optimisation des procédures et la sensibilisation et l’implication des acteurs sont fondamentaux.
Comment les éviter ?
Tout d’abord, il faut évaluer les risques et établir une cartographie des évènements qui peuvent survenir, car on ne prévient que ce que l’on connait, puis élaborer et suivre des procédures.
L’irradiation d’une femme enceinte
La radioprotection des femmes en âge de procréer doit être une préoccupation majeure. L’information des femmes doit être la plus large possible et l’interrogatoire systématique des femmes est fondamental à chaque étape de la prise en charge. En cas d’irradiation accidentelle d’une femme enceinte, il est très important d’avoir des procédures de conduite à tenir préétablies et d’évaluer le risque sans le surestimer pour ne pas avoir une attitude inappropriée quant à la poursuite de la grossesse.
L’erreur de patient
L’erreur de patient, dramatique en radiothérapie, doit être évitée par la mise en œuvre de mesures d’identitovigilance.
L’exposition des travailleurs
Les postes doivent être adaptés par la médecine du travail, notamment pour les manipulatrices enceintes. Il faut faire particulièrement attention aux intervenants extérieurs et ne pas leur laisser un accès libre aux salles. Comme souvent, les accidents se passent au niveau des interfaces, et chaque intervenant extérieur doit être sensibilisé au risque.
Optimiser les pratiques
Le matériel doit être récent et faire l’objet de maintenances régulières. Des contrôles qualité internes et externes doivent veiller au bon fonctionnement des équipements et éviter des dérives.
Elaborer et suivre des procédures et surveiller la dose
Pour tous les examens, il faut établir des protocoles d’acquisition, notamment pour ceux qui concernent le pelvis et les enfants. Il faut les diffuser et qu’ils soient connus de tous, former le nouveau personnel et faire attention aux utilisateurs occasionnels, pas toujours rodés aux équipements et à la mise en œuvre des protocoles. Les professionnels doivent suivre les doses et vérifier leurs pratiques pour les optimiser. Il faut bien sur effectuer le recueil réglementaire des doses, mais surtout analyser les niveaux de référence diagnostique (NRD) pour ensuite optimiser sa pratique. L’utilisation des logiciels de suivi de doses ou Dosimetry Archiving and Communication System (DACS) est fondamentale. Elle permet d’analyser a posteriori les doses reçues, d’évaluer et d’harmoniser ses pratiques pour ensuite les optimiser. La mise en place d’un système de veille permet de définir un seuil et une alarme se déclenchant lors d’un éventuel dépassement, ce qui permet de sensibiliser immédiatement l’équipe à l’utilisation d’un mauvais protocole et d’éviter que l’erreur ne se produise pour les examens suivants, ou de repérer un problème matériel.
En radiologie interventionnelle
La radiologie interventionnelle est potentiellement source d’accidents graves. Il faut repérer en premier lieu les patients à risque durant la consultation réalisée avant le geste. Il faut identifier les procédures à risque et optimiser ensuite ses pratiques : il faut prédéfinir la cadence des images, le champ de vue, etc. Il faut ensuite suivre la dose pendant l’examen, et le faire par un deuxième opérateur. La dose reçue doit être tracée, notamment en cas de séances itératives. Le suivi des patients sur le plus long terme sera organisé en fonction des gestes réalisés, pour ne pas méconnaître la survenue d’éventuelles complications. La Haute Autorité de Santé a édité un guide de recommandations pour la radiologie interventionnelle reprenant ces différents éléments.
Les DACS ont aussi un rôle fondamental en radiologie interventionnelle, permettant de définir les seuils de référence locaux de dose, d’évaluer les doses moyennes par procédure et ainsi de mettre en place un niveau de seuil et d’optimiser ces dernières.
Les médecins doivent s’engager
L’engagement des médecins est fondamental pour que la démarche d’optimisation aboutisse. En radiologie interventionnelle, ils doivent s’engager dans une démarche d’accréditation des pratiques à risque et définir les niveaux de référence pour chaque type de geste.
Une démarche qualité indispensable
Nous avons vu la nécessité d’une évaluation des risques, de l’organisation de l’information des patients, de mesures d’identitovigilance, de la mise en place de maintenances et de contrôles qualité des appareils, de la mise en place de protocoles et de leur diffusion, d’action de formation… tout ceci n’est possible qu’avec la mise en place d’une démarche qualité efficace.
Le référentiel Labelix, créé par la profession, reprend toutes les obligations réglementaires en termes de radioprotection des travailleurs et des patients et permet d’organiser la prise en charge des patients, les déclarations, les analyses, la mise en place des actions correctives et préventives ainsi que le suivi des évènements indésirables dans une logique de gestion des risques. Labelix est par ailleurs la meilleurs façon de se préparer, dès aujourd’hui, à la mise en place prochaine par l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) d’une assurance qualité obligatoire en imagerie dans le domaine de la radioprotection, suite à la transcription dans le code de la santé publique de la directive Euratom 2013.