les démarches nécessaires pour garantir nos pratiques de soins (ou la qualité en radiologie et imagerie médicale : mise au point des différents dispositifs existants en radiologie).Le sujet des démarches qualité en imagerie évolue vite. Plusieurs démarches se télescopent. Des propos contradictoires circulent. Aujourd’hui, les professionnels ne comprennent plus. Pour vous aider à y voir plus clair, cet article fait le point des démarches existantes et à venir.
Le sujet des démarches qualité en imagerie évolue vite. Plusieurs démarches se télescopent. Des propos contradictoires circulent. Aujourd’hui, les professionnels ne comprennent plus. Pour vous aider à y voir plus clair, cet article fait le point des démarches existantes et à venir. Une chose est acquise : en 2019, le radiologue doit connaitre et rentrer dans une démarche qualité afin de démontrer le respect des bonnes pratiques, la sécurité qu’il assure pour les patients et la gestion des risques dans sa pratique. Pour assurer ces démarches, l’équipe radiologique prend tout son sens car seul, le meilleur radiologue ne peut tout assumer compte tenu de la dépendance de notre exercice par rapport à notre environnement.
Les démarches de qualité s’appliquent non plus à des structures mais à des pratiques et à des équipes soignantes. Dans ce sens, la radiologie clinique prend tout son sens et se démarque d’autres spécialités ou d’exercice de la radiologie ne respectant pas les quatre piliers de la profession à savoir notre implication dans la pertinence des actes, dans la réalisation des examens, dans l’interprétation et dans le suivi des patients à partir des résultats obtenus. Nous n’avons pas un exercice industriel mais bien un exercice clinique que certains, par méconnaissance ou jugement réducteur, voudraient nous voir jouer. Notre qualité, c’est avant tout la défense de la prise en charge des patients et non des normes aveugles sans prise en compte du service rendu et des compétences soignantes. C’est en partant de ce service rendu que nous devons établir notre implication dans la gestion des risques et des complications éventuelles.
La certification ISO 9001
La norme ISO 9001 (1) « Systèmes de management de la qualité — Exigences » décrit les règles à respecter pour mettre en œuvre et entretenir un système de management de la qualité (SMQ). Le SMQ est une organisation et un mode de gestion interne qui permettent un management cohérent et une organisation robuste, dans lesquels on peut avoir confiance et qui délivreront une prestation dite «de qualité», c’est-à-dire maîtrisée et conforme à des critères prédéfinis.
Mais la norme ISO 9001 est générique. Elle s’applique à tous les secteurs d’activité économique. Elle n’est donc pas spécifique de la santé, encore moins de l’imagerie médicale.
La certification ISO 9001 (dans l’absolu, on devrait parler de certification de conformité aux exigences de la norme ISO 9001) est un mode de reconnaissance de la qualité qui atteste que le centre/service/pôle d’imagerie a mis en place un système d’organisation et de management de la qualité conforme aux exigences de cette norme. Autrement dit, quand un site est certifié ISO 9001, cela prouve que son SMQ répond aux attendus de la norme ISO 9001. Mais la certification ne prouve pas du tout que le site d’imagerie maîtrise les très nombreuses exigences métier qui relèvent de la spécialité (par exemple, la radioprotection, l’hygiène des actes et des soins, la sécurité informatique du RIS et du PACS, les règles de rédaction du compte-rendu d’examen d’imagerie, etc.). La certification ISO 9001 peut donner confiance dans le SMQ mis en place, mais pas dans la maîtrise des processus métier liés à la prise en charge des patients.
La labellisation Labelix
Pour pallier à ce défaut, Labelix (2) a été créé en 2004 par la FNMR sur la base des premiers travaux menés dès la fin des années 90 par le groupe de travail « Management de la qualité » de la SFR. Le label Labelix est un mode officiel de reconnaissance de la qualité des prestations des cabinets et services d’imagerie médicale. En d’autres termes, le label garantit à un observateur extérieur (un patient, un médecin clinicien correspondant, une tutelle, …) le respect systématique par le site labellisé d’un certain nombre de caractéristiques jugées obligatoires et réunies dans le référentiel de labellisation. Le label témoigne de l’atteinte et du respect d’un niveau de qualité qui correspond à un standard défini dans le référentiel. La labellisation Labelix a été déployée à partir de 2006. Elle est portée et soutenue par le Collège professionnel de l’imagerie (G4) depuis 2010. Labelix est donc utilisable quel que soit le mode d’exercice : public ou libéral. Le référentiel de labellisation et son guide de lecture sont les documents socles du processus de labellisation. Ils détaillent les exigences que le site d’imagerie doit respecter pour obtenir le label Labelix. Le référentiel est construit selon quatre grands axes : l’accueil, la prise en charge et l’information du patient, les sécurités, l’hygiène, la radioprotection et les autres exigences règlementaires, et enfin la construction du système de management de la qualité du cabinet/ service. Il réunit dans le même document les « exigences métiers » liés à la prise en charge du patient pour lui réaliser un acte d’imagerie (celles qui manquent dans l’ISO 9001) et les exigences de mise en œuvre d’un SMQ. Il reprend le contenu de la norme ISO 9001 en y ajoutant les exigences métier particulières de l’imagerie. Le label Labelix est délivré par la commission de labellisation de l’association Labelix, après réalisation d’un audit tierce partie indépendant réalisé par un organisme certificateur reconnu. Cette commission de labellisation analyse le rapport d’audit et l’ensemble du dossier et prend la décision de labellisation. Elle rédige une conclusion qui est envoyée au candidat avec le compte-rendu d’audit. Au jour d’aujourd’hui la démarche Labelix se rapproche le plus des exigences attendues dans la future décision ASN qui va imposer la mise en place d’une assurance qualité obligatoire dans le domaine de la radioprotection. Une nouvelle version du référentiel verra le jour dès publication officielle de la décision ASN, pour y coller au plus prêt et garantir aux sites labelisés qu’ils répondent bien à ces exigences réglementaires.
La certification des établissements de santé par l’HAS
La certification des établissements de santé (3) est mise en place depuis 1999. C’est une procédure obligatoire qui est réalisée tous les 4 ans. Elle est en constante évolution afin de s’adapter en permanence aux nouvelles exigences en matière de qualité et de sécurité des soins. La 5ème version, appelée V 2020, est en préparation. Elle sera orientée vers la pertinence des actes et des soins et l’évaluation du résultat de la prise en charge et du service rendu au patient. La certification délivrée par la HAS concerne tous les établissements de santé et pas spécifiquement le service d’imagerie. Son impact sur les pratiques en imagerie est variable, sauf pour la radiologie interventionnelle qui est une pratique exigible prioritaire (critère 26b), car considérée comme un secteur à risque majeur. Pour la HAS, une pratique exigible prioritaire est un domaine d’activité dans lequel le niveau d’exigences est très élevé en matière de sécurité des soins et d’amélioration de la qualité.
Le dispositif d’accréditation HAS des équipes dans les spécialités à risques
L’accréditation des médecins (4) existe depuis 2006. De nombreuses spécialités ont engagé une démarche d’accréditation qui au départ était réservée aux spécialités dite à risque comme l’obstétrique et les spécialités chirurgicales, mais aussi l’anesthésie-réanimation, la pneumologie, la gastro-entérologie, la cardiologie, l’échographie fœtale et la radiologie interventionnelle. Plus de 80 000 médecins et chirurgiens sont aujourd’hui accrédités avec une majorité de professionnel libéraux. La radiologie avait réfléchi à un programme (EPRX) qui n’a jamais été mis en place du fait qu’il se limitait à une partie de notre exercice à l’époque et que nous travaillons en groupe.
L’accréditation des médecins a évolué. Elle est maintenant étendue à toutes les activités et aux équipes médicales et soignantes (et non individuellement des radiologues). Elle a pour objectif de prévenir et de réduire les risques liés aux pratiques et actes médicaux, et donc d’améliorer la qualité et de la sécurité des soins. L’accréditation des médecins est délivrée par la Haute autorité de santé mais le dispositif repose sur des organismes agréés (ODPC-RIM en radiologie ; informations en ligne sur https://www.eiseverywhere.com/ ehome/odpcrim/757265/) qui mettent en place les programme et les audits cliniques. Ces organismes sont gérés par les médecins de la spécialité et réalisent donc des audits cliniques assurés par les pairs.
Ces audits reposent sur la mise en place d’un processus de gestion des risques médicaux et d’un accompagnement des équipes dans l’amélioration de la qualité et de la sécurité de leurs pratiques professionnelles. Cet accompagnement est fait par des radiologues experts. Les audits reposent sur des recommandations de la profession, sur les obligations réglementaires et, éventuellement, sur des normes complémentaires. Le principe est de déclarer des événements indésirables associés aux soins (EIAS), observés dans sa pratique, de les analyser avec les experts pour élaborer des recommandations qui permettront de contenir et limiter les risques et d’améliorer les pratiques. Ces EIAS peuvent être ciblés par la profession (évènements liés aux produits de contraste, à l’IRM, à l’interventionnel) ou bien non ciblés (radiophysique et radioprotection, pertinence, conflit, …)
Ce dispositif d’accréditation couvre tous les risques liés à l’imagerie. Nous encourageons les radiologues et leurs équipes à adhérer à ce dispositif. L’accréditation HAS garantit un engagement des professionnels dans une démarche d’amélioration continue en passant par une évaluation par les pairs de leurs pratiques. Pour être opérationnel, elle nécessite de s’appuyer sur des recommandations de la profession, des normes, des obligations, des audits encadrés. Elle valide les obligations de développement professionnel continue et sera utile pour la re-certification des professionnels (rapport Uzan).
Le projet récent d’accréditation du COFRAC
Le COFRAC a récemment annoncé qu’il souhaitait proposer une norme pour la radiologie. De manière unilatérale et sans concertation avec les représentants de la profession, il vient de publier un document d’accréditation dans le domaine de l’imagerie médicale, rédigé sur la base de la norme ISO 15189. Cette norme fixe les exigences particulières concernant la qualité et la compétence des laboratoires de biologie médicale. Malheureusement pour les professionnels de l’imagerie, le quatrième paragraphe de l’introduction de la norme ISO 15189 dit que « Bien que la présente Norme internationale soit destinée à être utilisée dans toutes les disciplines effectivement pratiquées par les laboratoires de biologie médicale, d’autres secteurs et d’autres disciplines (par exemple physiologie, imagerie médicale et biophysique) peuvent également la juger utile et appropriée »!! Le COFRAC n’a pas manqué de s’engouffrer dans la brèche.
Même s’il le présente comme un document de travail perfectible, le texte publié est incomplet et extrêmement compliqué à mettre en œuvre. Il n’est pas adapté à l’imagerie. D’ailleurs le G4 a publié le 19 novembre 2018 un communiqué de presse dans lequel il dénonce cette initiative à laquelle il n’est pas associé et qu’il ne soutient pas. Le conseil professionnel ne recommande pas aux radiologues de participer à l’expérimentation COFRAC qui devrait débuter courant 2019 car les recommandations ne s’appuient pas sur des experts reconnus par la profession.
Et prochainement, un référentiel AFNOR
L’AFNOR publiera en 2019 un document normatif « Prestations de santé en imagerie médicale » ayant le statut d’accord. Il a été rédigé en partenariat avec le Conseil National de la Profession de Radiologie (G4) et les médecins nucléaires, sous l’égide de la Direction générale de la santé. Cet accord reprend toute l’expérience accumulée par la radiologie depuis 15 ans avec Labelix, dont il est proche par le contenu, mais étendu aux pratiques et aux prises en charge.
Le contenu de ce référentiel s’articule autour des standards de prestations de santé en imagerie médicale (incluant la radiologie et imagerie médicale, la médecine nucléaire, la radiologie interventionnelle, les activités chirurgicales utilisant l’imagerie médicale).
Les objectifs des activités de radiologie et d’imagerie médicale sont ceux de toute prestation de santé, à savoir offrir un soin pertinent, conforme au standard du moment, au risque maîtrisé, annoncé et consenti, à la bonne personne sans erreur sur son identité, accessible à tous, prenant en compte les attentes du patient délivré avec hospitalité et bientraitance. Les objectifs dépassent évidemment la seule production d’images ou la réalisation d’un geste, ce d’autant qu’ils intègrent tout avis ou discussion sur l’imagerie en amont et en aval de la prise en charge du patient en radiologie et imagerie médicale. Plus largement, pour offrir au patient, quel qu’il soit et où qu’il soit, la meilleure prise en charge en matière d’accessibilité, de qualité et de sécurité des soins, il convient d’optimiser l’organisation et les moyens humains et matériels nécessaires à cette prestation, dans un objectif d’efficience respectant un équilibre médico-économique.
Le référentiel permettra à des pairs d’évaluer sous forme d’audit clinique la compétence d’une structure d’imagerie médicale (service / département / cabinet) à réaliser des actes de radiologie et d’imagerie médicale et ainsi lui délivrer un mode de reconnaissance de la qualité pour la réalisation de ces actes. Le respect de ce référentiel assure au patient la compétence de l’équipe médicale et soignante, la pertinence et la qualité des soins et la sécurité des pratiques. Il doit permettre aux professionnels d’améliorer leurs pratiques de prise en charge tout en préservant du temps et de l’énergie pour les pratiques de soins. L’ensemble des exigences du référentiel s’appliquera également à la télé-imagerie. Le respect des exigences réglementaires, nationales et/ou européennes, est un prérequis indispensable, sans lequel l’accréditation selon le présent référentiel ne peut pas être délivrée en particulier le respect des principes de justification et d’optimisation.
Après le rappel du domaine d’application et des termes et définition, le document est articulé autour des exigences médico-techniques, du parcours patient pour la réalisation d’un acte de radiologie et d’imagerie médicale, d’une organisation du système de management de la qualité de la structure d’imagerie médicale, de la réalisation d’audit externe par les pairs et de références normatives et bibliographiques. Pour faire court, c’est Labelix remis sous une forme normative, avec des ajouts de la profession suite à l’évolution des pratiques. Le principe de l’audit par les pairs (lien avec l’accréditation des équipes en radiologie, HAS) est établi et complémentaire. Cet accord sera le support à la mise en œuvre d’une démarche qualité, qui sera sans doute une future démarche obligatoire.
La future décision ASN
L’ASN assure la réglementation des organisations et équipements émettant un rayonnement ionisant ; à ce titre elle veille au respect des normes en vigueur par des visites de conformité (5, 6). Nous attendons la publication d’une décision de l’ASN fixant les obligations d’assurance de la qualité et de gestion des risques en radiologie médicale. Cette décision est l’application dans le droit français des articles 56.4 et 63 de la directive Euratom 2013/59. Elle impose à toutes les structures d’imagerie médicale de mettre en œuvre un véritable système de management de la qualité et de gestion des risques pour appliquer les principes de justification et d’optimisation et maîtriser les risques liés aux rayons X. La démarche qualité / gestion des risques attendue par l’ASN englobe les obligations de contrôle qualité et de maintenance des équipements radiogènes.
En conclusion
La qualité est une notion complexe qui concerne à la fois les hommes avec leurs compétences, les équipements et les processus organisationnels. La notion de qualité se travaille au quotidien dans une logique d’amélioration continue. En radiologie, l’organisation est structurée ainsi sur les recommandations de la profession endossées par le G4, approuvées par la DGS et traduite en norme AFNOR, les obligations ASN ou autres réglementations, les formations de la profession et une évaluation par les pairs s’appuyant sur l’accréditation des équipes en radiologie délivrée par la HAS. Certaines démarches sont obligatoires avec respect des obligations réglementaires et statutaires tandis que d’autres sont volontaires mais nécessaire pour démontrer notre implication dans nos bonnes pratiques et les faire valider par le dispositif d’accréditation des équipes. Nous ne pouvons donc qu’encourager et aider les professionnels de radiologie et d’imagerie médicale à s’engager sur cette voie pour éviter des contrôles par des organismes ou personnels non représentatifs.
Dr Jean-Charles LECLERC
Radiologue,
Président de la commission
de labellisation.
Pr Jean-Paul BEREGI
Radiologue.